Un retour en force de la collecte au T3 2025
Les Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI) confirment leur rebond au troisième trimestre 2025 avec une collecte nette de 1,1 milliard d'euros, selon les données publiées le 4 novembre par l'ASPIM (Association française des Sociétés de Placement Immobilier). Ce montant marque une progression de 38 % sur un an glissant et de 1 % par rapport au trimestre précédent.
Sur les neuf premiers mois de l'année, la collecte nette atteint 3,3 milliards d'euros, soit une hausse de 33 % par rapport à la même période de 2024. La collecte brute s'établit quant à elle à 1,35 milliard d'euros au T3, en augmentation de 26 % sur douze mois, portant le cumul depuis janvier à 4 milliards d'euros (+18 %).
Au 30 septembre 2025, la capitalisation globale du marché des SCPI s'élève à 88 milliards d'euros, un niveau quasi-stable sur un an qui reflète la maturité du secteur regroupant 232 fonds gérés par 54 sociétés de gestion.
Le paradoxe d'une collecte dynamique malgré des valorisations en recul
Cette reprise de la collecte intervient alors même que les valorisations des SCPI continuent de s'ajuster. La valeur de réalisation par part a reculé de 1,2 % au premier semestre 2025, prolongeant une tendance baissière amorcée début 2023. Entre mars 2023 et janvier 2025, 39 SCPI ont procédé à une révision à la baisse de leur prix de part.
Parmi les dévalorisations les plus marquées, Primopierre a enregistré une baisse de 39,4 % sur deux ans, suivie de Laffitte Pierre (-34,4 %) et Accimmo Pierre (-31 %). En début d'année 2025, quatre SCPI ont encore révisé leurs tarifs à la baisse : LF Grand Paris Patrimoine (-14,51 %), Épargne Foncière (-19,71 %), Crédit Mutuel Pierre 1 (-18,87 %) et Select Invest 1 (-17,19 %).
Paradoxalement, cette correction des prix a mécaniquement fait progresser le taux de distribution moyen des SCPI, qui s'établit à 4,72 % en 2024 contre 4,52 % en 2023, selon les chiffres officiels de l'ASPIM. Ce phénomène résulte d'un effet de calcul : à dividende constant ou légèrement en baisse, un prix de part réduit améliore le rendement affiché pour les nouveaux souscripteurs.
Un marché à deux vitesses : diversification contre spécialisation
L'analyse de la répartition sectorielle révèle un clivage marqué entre les stratégies d'investissement. Les SCPI à stratégie diversifiée ont concentré 74 % de la collecte brute du troisième trimestre, témoignant de la forte appétence des épargnants pour les fonds qui répartissent leurs actifs entre plusieurs types de biens : bureaux, commerces, santé, logistique ou résidentiel.
À l'inverse, les SCPI à prépondérance bureaux n'ont capté que 14 % des souscriptions, suivies par les fonds spécialisés dans la santé et l'éducation (3 %), la logistique et les locaux d'activité (3 %), puis les commerces (2 %). Cette désaffection pour les bureaux s'explique par les tensions structurelles qui pèsent sur ce segment depuis la généralisation du télétravail post-Covid.
Les SCPI de bureaux concentrent d'ailleurs 77 % de l'augmentation du volume de parts en attente au troisième trimestre, avec une progression de 60 millions d'euros. Ce phénomène d'illiquidité touche particulièrement les fonds exposés aux immeubles de seconde zone en Île-de-France, où le taux de vacance atteint 10 % du parc, soit 6 millions de mètres carrés.
Les fonds jeunes et diversifiés tirent leur épingle du jeu
« Les SCPI jeunes et diversifiées ont le vent en poupe en 2025 », affirme Gilles Belloir, directeur général de Placement-direct.fr. « Elles peuvent investir à des valorisations immobilières plus basses grâce à la baisse des prix, ce qui se traduit par des rendements locatifs significativement meilleurs que les SCPI anciennes. »
Cette analyse se confirme dans les performances : si le rendement moyen du secteur s'établit à 4,3 % en août 2025, certaines SCPI récentes affichent des taux nettement supérieurs. Remake Live atteint ainsi 7,50 % de rendement, tandis qu'Iroko Zen se positionne à 7,32 %. Les fonds les plus performants visent même des rendements bruts entre 8 % et 10 %.
Cette surperformance s'accompagne d'une stratégie d'internationalisation : près des trois quarts des acquisitions de SCPI réalisées au premier semestre 2025 l'ont été hors de France, les gestionnaires cherchant des opportunités dans des marchés européens plus dynamiques ou moins saturés.
Des risques qui persistent malgré la reprise
Pierre-Antoine Burgala, analyste du secteur immobilier, met en garde les investisseurs : « Il convient d'éviter les SCPI qui ont constitué leur patrimoine entre 2012 et 2021, car certaines sont davantage exposées à des immeubles de bureaux chers qui sont aujourd'hui obsolètes. » Cette obsolescence résulte de l'évolution des besoins des entreprises, qui privilégient désormais des espaces hybrides, plus flexibles et mieux situés.
Le risque de liquidité demeure l'une des principales contraintes du placement en SCPI. Si la majorité des fonds offrent un marché secondaire organisé pour l'achat et la revente de parts, environ 40 SCPI rencontrent encore des difficultés persistantes à absorber le volume croissant de demandes de cession. La revente peut nécessiter plusieurs mois et s'effectuer avec une décote pouvant atteindre 10 % à 15 % du prix de part officiel.
Les frais d'entrée, qui oscillent généralement entre 10 % et 12 % du montant investi, constituent également un point d'attention. Gilles Belloir recommande ainsi « un horizon d'investissement minimum de huit ans pour amortir ces frais d'entrée et bénéficier pleinement du rendement récurrent des SCPI ».
SCPI versus autres placements : une comparaison éclairante
Malgré ces contraintes, les SCPI maintiennent un avantage comparatif notable face aux autres placements d'épargne disponibles en 2025. Avec un rendement moyen de 4,72 % en 2024, elles surclassent largement les fonds en euros d'assurance-vie, dont les meilleurs contrats affichent des performances comprises entre 2,5 % et 3,5 %.
L'écart est également significatif avec le Livret A, dont le taux est maintenu à 3 % en 2025. Toutefois, cette comparaison doit tenir compte des profils de risque radicalement différents : le Livret A garantit le capital et offre une liquidité immédiate, tandis que les SCPI exposent à un risque de perte en capital et à des délais de sortie.
Les investisseurs doivent donc arbitrer entre sécurité et rendement. Pour les épargnants disposant d'un horizon de placement à long terme et d'une tolérance au risque modérée, les SCPI diversifiées et récentes représentent une option attractive dans un contexte de taux d'intérêt qui, bien qu'en baisse depuis mi-2024, demeurent nettement supérieurs aux niveaux de la décennie 2010-2020.
Perspectives et stratégies pour les investisseurs
L'année 2025 marque ainsi une phase de transition pour le marché des SCPI. D'un côté, les signaux de reprise se multiplient : stabilisation des taux directeurs, retour progressif de la liquidité, redémarrage des transactions immobilières commerciales avec 8,9 milliards d'euros investis sur les trois premiers trimestres (+7,2 % sur un an).
De l'autre, les défis structurels persistent, notamment sur le segment des bureaux où l'ajustement aux nouvelles pratiques de travail est loin d'être achevé. Le marché européen montre néanmoins des signaux encourageants, avec une reprise des transactions dans certains territoires comme le Royaume-Uni, l'Allemagne ou les Pays-Bas.
Pour les épargnants souhaitant investir en SCPI en 2025, les experts recommandent de privilégier trois critères : la diversification sectorielle et géographique, la jeunesse du fonds (capable d'investir aux valorisations actuelles plus basses), et la transparence de la société de gestion sur la composition du patrimoine et la gestion de la liquidité.
Les SCPI demeurent ainsi une solution d'épargne performante pour qui accepte d'immobiliser son capital sur le long terme, à condition de sélectionner rigoureusement les fonds et d'intégrer cet investissement dans une allocation patrimoniale équilibrée.