GAREAT et CCR : Comment Fonctionne le Système Français de Réassurance Terrorisme ? Derrière la simplicité apparente de l'assurance terrorisme obligatoire en France se cache un dispositif sophistiqué e


Derrière la simplicité apparente de l'assurance terrorisme obligatoire en France se cache un dispositif sophistiqué et unique au monde : le système GAREAT, adossé à la Caisse Centrale de Réassurance (CCR) et à la garantie illimitée de l'État. Ce mécanisme, né au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, permet aux entreprises françaises de bénéficier d'une protection sans plafond face à un risque considéré comme non assurable par les mécanismes de marché classiques.
Mais comment fonctionne concrètement ce système ? Qui paie quoi, et jusqu'à quel montant ? Quel est le rôle exact de la CCR et de la garantie de l'État ? Cet article décrypte en détail l'architecture de la réassurance terrorisme en France, ses acteurs et son financement.
Le risque terroriste présente des spécificités qui le rendent inassurable par les mécanismes classiques du marché de l'assurance :
1. Imprévisibilité radicale Contrairement aux sinistres traditionnels (incendies, dégâts des eaux, vols) dont les statistiques permettent de modéliser les fréquences et coûts moyens, les attentats terroristes sont par nature imprévisibles : leur localisation, leur ampleur et leur fréquence échappent à toute modélisation actuarielle fiable.
2. Potentiel catastrophique Un seul événement peut générer des milliards d'euros de dommages concentrés sur une zone géographique restreinte. Les attentats du 11 septembre 2001 ont coûté plus de 40 milliards de dollars aux assureurs, soit l'équivalent du sinistre le plus coûteux de l'histoire de l'assurance.
3. Cumul extrême Le terrorisme frappe des zones à forte densité de valeurs assurées (centres-villes, quartiers d'affaires, infrastructures stratégiques), créant un effet de cumul que les assureurs ne peuvent absorber seuls sans mettre en péril leur solvabilité.
Face à cette réalité, la plupart des pays développés ont mis en place des partenariats public-privé associant :
| Pays | Dispositif | Année de création | Plafond public |
|---|---|---|---|
| France | GAREAT + CCR | 2002 | Illimité (au-delà 2,8 Mds€) |
| Royaume-Uni | Pool Re | 1993 | £6 milliards + garantie État |
| États-Unis | TRIA | 2002 (renouvelé 2027) | $100 milliards fédéraux |
| Espagne | Consorcio | 1954 (élargi 2004) | Garantie État illimitée |
| Allemagne | Extremus | 2002 | €10 milliards + État |
La France se distingue par une garantie illimitée de l'État et un caractère obligatoire de la couverture.
Avant 2001, la garantie terrorisme existait en France depuis 1986, mais elle était portée directement par les assureurs sans mécanisme de réassurance spécifique. Les attentats du 11 septembre ont révélé les limites de ce système face à un risque de très grande ampleur.
Les réassureurs internationaux, confrontés à des pertes massives, ont annoncé leur retrait quasi-total de la couverture terrorisme, créant un vide de capacité sur le marché français.
En réponse à cette crise, les acteurs du marché français de l'assurance ont créé GAREAT (Gestion de l'Assurance et de la Réassurance des risques Attentats et actes de Terrorisme) en janvier 2002. Ce dispositif repose sur trois piliers :
1. Deux pools de réassurance
2. La CCR comme réassureur public La Caisse Centrale de Réassurance, établissement public créé en 1946, intervient en réassurance illimitée au-delà de 2,8 milliards d'euros.
3. La garantie de l'État L'État français garantit les engagements de la CCR sans plafond, apportant la sécurité financière ultime au système.
En 2006, le dispositif GAREAT a été élargi aux risques NRBC (Nucléaire, Radiologique, Biologique et Chimique), reconnaissant que les nouvelles formes de terrorisme pouvaient impliquer des armes non conventionnelles :
Cette extension a positionné la France comme l'un des systèmes les plus complets au monde.
Le système GAREAT fonctionne comme une pyramide à quatre étages, chacun prenant le relais lorsque le précédent atteint sa limite :
Rôle : Les compagnies d'assurance (Axa, Generali, Allianz, Groupama, etc.) assurent directement les entreprises et indemnisent les sinistres terrorisme jusqu'à un plafond cumulé de 2 milliards d'euros par événement.
Mécanisme :
Capacité estimée : 2 milliards d'euros cumulés pour l'ensemble des assureurs français.
Rôle : Le pool des Petits et Moyens Risques intervient lorsque les sinistres cumulés d'un événement dépassent 2 milliards d'euros et jusqu'à 2,5 milliards d'euros.
Fonctionnement :
Périmètre : Commerces, PME, TPE, habitations, risques "ordinaires".
Rôle : Le pool des Grands Risques prend le relais de 2,5 à 2,8 milliards d'euros.
Spécificités :
Périmètre : Immeubles de grande hauteur (IGH), centres commerciaux > 20 000 m², sièges de grandes entreprises, infrastructures sensibles.
Rôle : La Caisse Centrale de Réassurance, adossée à la garantie illimitée de l'État français, réassure 100% des sinistres au-delà de 2,8 milliards d'euros.
Caractéristiques exceptionnelles :
Impact : Cette garantie illimitée est la clé du système français. Elle permet de couvrir des scénarios catastrophiques (attentat nucléaire, destruction simultanée de plusieurs quartiers d'affaires) que le seul secteur privé ne pourrait absorber.

La CCR est un établissement public à caractère industriel et commercial créé en 1946, placé sous la tutelle du ministère de l'Économie et des Finances.
Missions historiques de la CCR :
Chiffres clés CCR (2024) :
La garantie de l'État français au bénéfice de la CCR est inscrite dans le Code des assurances (articles L431-9 et suivants). Concrètement :
Scénario d'activation :
Montant mobilisable : Théoriquement illimité, adossé à la signature de l'État français (notation AAA).
Coût pour l'État : Depuis 2002, la garantie n'a jamais été activée. L'État n'a donc rien déboursé, tandis que les primes collectées ont constitué des provisions substantielles.
Source : Cotisations des entreprises et particuliers assurés Montant moyen : Variable selon contrat, généralement 2 à 5% de la prime totale d'assurance professionnelle Bénéficiaires :
Exemple pour une entreprise :
Montant : 6,50€ par contrat d'assurance couvrant des biens en France (2025) Collecte annuelle estimée : ~500 millions d'euros (env. 75 millions de contrats × 6,50€) Affectation : Intégralement versée au FGTI (Fonds de Garantie des Victimes des actes de Terrorisme et d'autres Infractions)
Utilisation du FGTI :
Distinction clé :
| Garantie terrorisme (via primes) | FGTI (via taxe 6,50€) |
|---|---|
| Dommages matériels des entreprises | Dommages corporels des personnes |
| Bâtiments, équipements, stocks | Morts, blessés, traumatisés |
| Perte d'exploitation | Préjudices économiques des victimes |
Au fil des années, le système GAREAT a accumulé des provisions importantes :
Estimations 2024 :
Ces provisions permettent d'absorber un événement majeur sans augmentation brutale des primes post-sinistre.
Création : 1993 après attentats IRA à la City de Londres Structure : Pool de réassurance mutualiste entre assureurs Garantie État : Intervention au-delà de £6 milliards (env. 7 Mds€) Couverture : Facultative (contrairement à la France) Tarification : Selon zone géographique et type de bien
Différence avec GAREAT : La couverture terrorisme n'est pas obligatoire au Royaume-Uni. Les entreprises peuvent choisir de ne pas s'assurer, ce qui crée des inégalités de protection.
Création : 2002 (Terrorism Risk Insurance Act) Structure : Programme fédéral temporaire renouvelé régulièrement (dernière extension jusqu'en 2027) Garantie État : Jusqu'à $100 milliards au niveau fédéral Mécanisme : L'État rembourse 80% des pertes dépassant certains seuils (déductibles) Couverture : Facultative, souscription à la demande
Différence avec GAREAT : Le TRIA est un programme temporaire devant être renouvelé tous les 5-7 ans par le Congrès. Il comporte un plafond de $100 milliards, au-delà duquel la couverture n'est pas garantie.
Création : 1954 (élargi au terrorisme en 2004 après attentats de Madrid) Structure : Organisme public d'assurance Garantie État : Illimitée Couverture : Obligatoire (comme en France) Tarification : Surprime standardisée selon catégorie de bien
Similitude avec GAREAT : Couverture obligatoire et garantie illimitée de l'État. L'Espagne et la France ont les deux systèmes les plus protecteurs au monde.
Points forts de GAREAT : ✓ Obligation de couverture : Aucune entreprise ne peut être "oubliée" ✓ Garantie illimitée : Aucun plafond absolu, contrairement aux USA ou Allemagne ✓ Stabilité dans le temps : Système pérenne (créé en 2002), pas de renouvellement politique périodique ✓ Réactivité : Déclenchement automatique sans vote parlementaire ✓ Solidarité nationale : Mutualisation complète du risque sur tout le territoire
Point d'attention :
Le débat le plus actuel concerne l'extension du dispositif GAREAT aux cyber-attaques à motivation terroriste. Actuellement, les attaques informatiques ne sont pas couvertes par la garantie terrorisme, même si elles sont revendiquées par un groupe terroriste.
Arguments pour l'inclusion :
Arguments contre :
Perspective : Une inclusion progressive est envisagée à l'horizon 2027-2028 avec des plafonds spécifiques et des critères de qualification stricts.
La taxe attentat a connu plusieurs hausses :
Perspective 2026-2030 : Une nouvelle augmentation à 7,50€ voire 8€ est évoquée pour :
Un enjeu majeur pour GAREAT est d'améliorer la communication vers les assurés :
Initiatives attendues :
1. Vous êtes automatiquement protégé Tout contrat d'assurance de biens inclut obligatoirement la garantie terrorisme. Vous n'avez aucune démarche à effectuer.
2. La protection est illimitée Grâce à la garantie de l'État via la CCR, il n'existe aucun plafond absolu au niveau du système. Seuls les plafonds de votre contrat individuel s'appliquent.
3. Vous payez la taxe de 6,50€ Cette taxe apparaît sur votre attestation d'assurance et finance le FGTI (victimes corporelles), pas la garantie matérielle.
4. Le système n'a jamais été mis en défaut Depuis 2002, tous les attentats en France ont été indemnisés dans les délais et montants prévus, sans défaillance du système.
5. Vérifiez vos plafonds individuels Si le système GAREAT est illimité, votre contrat individuel peut comporter des plafonds (exemple : "capital assuré limité à 5 millions d'euros"). Vérifiez ces plafonds avec votre assureur.
Pour optimiser votre protection, posez ces questions précises :
"Quel est le plafond de garantie terrorisme pour mes bâtiments ?" Réponse attendue : Montant précis ou "capital assuré du bien".
"Ma perte d'exploitation terrorisme est-elle plafonnée en durée ?" Réponse attendue : "12 mois", "24 mois" ou "selon valeur déclarée".
"Quelle franchise s'applique en cas de sinistre terrorisme ?" Réponse attendue : Pourcentage + montant minimum (ex : "10% avec minimum 5 000€").
"Ma couverture terrorisme inclut-elle les risques NRBC ?" Réponse attendue : "Oui" (obligatoire depuis 2006).
"En cas d'événement majeur, des acomptes provisionnels sont-ils prévus ?" Réponse attendue : "Oui, selon protocole GAREAT en cas d'activation niveau 3 ou 4".
Le système GAREAT, adossé à la CCR et à la garantie illimitée de l'État français, constitue l'un des dispositifs les plus protecteurs au monde pour les entreprises face au risque terroriste. Sa solidité repose sur une architecture à quatre niveaux mutualisant le risque entre secteur privé et puissance publique, garantissant une protection sans plafond absolu.
Comprendre ce mécanisme permet aux chefs d'entreprise de :
En 2025, la véritable question n'est plus "Suis-je couvert contre le terrorisme ?" (oui, obligatoirement), mais "À quelle hauteur suis-je couvert et mes plafonds correspondent-ils à mes actifs réels ?"
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